« la courbe d’involution – évolution » est un modèle théorique, une hypothèse de pensée
A travers les sciences, les philosophies et les religions, il y a de multiples façons de se représenter l’histoire de l’être humain au point de vue individuel et collectif et de répondre aux questionnements fondamentaux sur le sens de la vie, son origine et son devenir.
En général, ces représentations proposent des modèles de développement selon une progression linéaire, accumulative et ascendante vers un plus qui peut aussi s’inverser à un moment et aller vers une décroissance et une disparition.
Dans différentes traditions ésotériques, il existe une autre proposition qu’on appelle « la courbe d’involution – évolution ». En voici une présentation très succincte.
C’est un modèle théorique, donc une hypothèse de pensée, qui se veut global, c’est-à-dire non seulement applicable à l’humain dans toutes ses dimensions, mais aussi à tous les autres règnes de la nature terrestre et, également, de l’infiniment petit à l’infiniment grand, à l’ensemble de la vie de tout l’univers.
Celui-ci est composé d’Esprit et de Matière, deux réalités fondamentales qui se différencient par des fréquences vibratoires très élevées et subtiles pour l’un et beaucoup plus basses et denses pour l’autre et qui cherchent à se rejoindre pour s’harmoniser en « spiritualisant la Matière ».
Nous pouvons définir l’Esprit comme le monde de l’abstrait, le divin, la lumière, l’amour, l’unité, la vie une, l’illimité dans l’espace et le temps, etc, et la Matière comme le monde du concret, de l’opacité, des formes multiples, de la séparation, de l’individualité, etc.
La rencontre va se faire en deux phases opposées, la descente ou l’involution et la remontée ou l’évolution, avec, entre elles, au fond de la courbe, une phase de transformation particulièrement importante d’individualisation.
L’involution c’est l’incarnation
Pour l’être humain, l’involution c’est d’abord l’incarnation, c’est-à-dire la construction et la prise de possession par une âme d’un corps physique appelé à grandir et à progresser dans ses capacités multiples, avec peu à peu aussi un corps émotionnel et un corps mental.
En apprenant à connaître ces trois composantes de son identité, la personne va pouvoir mieux les gérer, les utiliser, les développer et les harmoniser entre elles, jusqu’à se construire une personnalité de plus en plus élaborée, complexe et unique. Elle passe ainsi d’une conscience de masse ou de dépendance à une conscience individuelle ou d’indépendance.
C’est l’arrivée au creux de la courbe, là où l’individu s’affirme de plus en plus dans sa liberté, ses besoins, ses envies, ses désirs, sa volonté…
C’est une étape que nous connaissons bien puisqu’elle concerne actuellement, à des degrés différents, la majorité de la population de nos sociétés occidentales, avec pour conséquence la primauté de l’intérêt individuel sur l’intérêt collectif et un attachement certain aux objets matériels.
A ce stade, nous pouvons dire que l’âme humaine a construit son « outil », c’est-à-dire son égo. Et c’est à partir de là que se pose la question de savoir si cet outil n’est fait que pour sa propre satisfaction et auto-admiration, en essayant de tout mettre au service de cet objectif.
Ou alors, peut-il y avoir une ouverture vers les autres et vers l’Autre, une transformation avec de nouvelles aspirations qui se font ressentir sous forme de recherche spirituelle intériorisée ? Dans ce cas, la personnalité, forte de l’expérience de son libre arbitre choisit de se mettre au service de l’âme et de s’élever vers la conscience de groupe ou d’inter-indépendance (selon les termes de Patrice Brasseur).
La phase d’évolution représente un ensemble où chacun trouve sa place
A partir de là, se produit une inversion complète du sens de la courbe et aussi des valeurs qui orientent la vie de chacun et de tous. En effet, dans la phase d’évolution qui s’amorce, nous passons du souci primordial du développement personnel à la volonté de servir, de la valorisation de la différenciation à la conscience d’unité et d’appartenance à un Tout, à un ensemble où chacun trouve sa place, comme une pièce d’un puzzle.
Evidemment, cet état de conscience s’étend non seulement à l’humanité tout entière mais aussi aux autres règnes de la nature terrestre et à tout l’univers.
Le chemin de la progression de conscience passe, à chaque fois, par une profonde recherche à l’intérieur de soi.
Dans la première transition, cette recherche, plus psychologique, est essentiellement tournée vers son ressenti, ses émotions et son histoire passée alors que dans le deuxième passage, plus tourné vers la spiritualité, il s’agit de s’ouvrir, par la méditation entre autres, à la perception d’un autre niveau d’intuition.
C’est là que nous expérimentons, peu à peu, une nouvelle forme de conscience et un mental supérieur qui puise ses informations dans le Soi. Alors, la personnalité se met au service de l’âme et des intérêts de l’ensemble.
Dans l’involution, les moteurs du changement sont la souffrance et le désir ; dans l’évolution, ce sont l’amour inconditionnel et le service.
Nous situer sur cette courbe nous permet de mieux nous connaître, nous comprendre et de faire le point sur notre itinéraire de vie.
Il en est de même vis-à-vis des autres, d’autant plus que cette conception philosophique apporte une grande tolérance et l’acceptation de là où en est chacun, car nous passons tous par les mêmes chemins et les mêmes expériences et erreurs pour progresser. C’est comparable à notre parcours scolaire où nous ne pouvons demander à un élève de primaire d’avoir les mêmes connaissances et comportements qu’un lycéen !
Pour les professionnels de l’accompagnement psychologique, social ou spirituel, il est évident, aussi, que situer sur ce chemin de conscience les personnes qui nous sollicitent va grandement nous aider à mieux les comprendre et à leur proposer des outils plus adaptés. Car, comme le disait Arnaud Desjardins, « La psychothérapie guérit l’égo et la voie spirituelle guérit de l’égo ». Précisons d’abord que ceux qui demandent de l’aide le font en général dans un moment de déséquilibre et de questionnement, donc dans une période de transition entre deux phases. En effet, en pleine conscience de masse, il y a encore peu de développement du mental et donc peu de remise en question – la valeur principale étant la continuation dans la tradition et la transmission à l’identique –.
De même, au cœur de la conscience individuelle, l’égo n’a guère besoin des conseils d’autrui. Quant à la conscience de groupe, il y a encore peu de personnes qui l’ont intégrée totalement.
Dans les transitions entre chaque étape de développement de l’Être le besoin d’aide peut être fondamental
Par contre, dans les transitions entre chaque étape et les pertes de repères qui s’en suivent, le besoin d’aide peut être fondamental. C’est là qu’il vaut mieux ne pas se tromper et risquer d’encourager la personne à aller vers plus d’individualisation, alors qu’elle n’en est plus à ce stade, ou au contraire, lui proposer de découvrir les valeurs du groupe alors quelle n’a pas encore construit sa personnalité. Et le repérage n’est pas toujours facile car nous sommes souvent partagés entre des avancées vers l’élévation de notre conscience et des régressions involontaires ou nécessaires au nettoyage psychologique ou énergétique d’anciennes mémoires qui nous bloquent encore.
Il est vrai que la route comporte quelques pièges. Pour le premier passage, ce peut être de vouloir aller trop vite et ainsi éviter de « travailler » sur la part d’ombre qui nous dérange. Pour le deuxième, ce serait, par exemple, de se complaire à peaufiner le perfectionnement de son « outil » alors qu’il est temps de lui trouver sa véritable utilisation. Ce qui demande à l’égo du lâcher-prise et l’abandon du contrôle.
L’essentiel est de progresser
Cependant, pour chacun de nous, quel que soit l’endroit où nous sommes sur ce chemin de conscience, l’essentiel est de progresser, car la vie est mouvement permanent et toute expérience nouvelle peut être source de connaissance et de transformation. En sachant que le destin d’un gland n’est pas de devenir un gland de quinze mètres de diamètre, mais de mourir en tant que gland pour devenir un chêne de quinze mètres de haut.
Bernard Molliex
Thérapeute Psychocorporel
Grenoble et Albertville
Bibliographie
Alice Bailey, Le traité du feu cosmique, éd. Lucis Trust
Annie Marquier, La liberté d’être, éd. Du Gondoret
Patrice Brasseur conférences sur le site www.psychosophie.com